LE POEME DE JACQUELINE

Confidences intra-muros

Lorsque mon humeur vagabonde

Me mène hors des sentiers battus

A la découverte du monde,

Mes exploits ne se comptent plus.

Mais je suis ton ami fidèle,

Tu peux avoir confiance en moi.

Dès l’instant où ta voix m’appelle,

Vite, [ auprès de tot (Hum J Voire)

De loin ma place favorite

C’est là au creux de tes genoux.

Mais ces instants passent si vite!

Ne sens-tu pas comme ils sont doux?

Dans ma prunelle énigmatique

Découvres-tu quelque secret?

C’est là un privilège unique

Que je réserve à qui me plaît.

Si quelquefois ta voix me gronde:

- Pardon lje ne le ferai plus!

Il est trop compliqué ce monde

Des permis et des défendus.

Si tout s ‘embrouille en ma cervelle,

Même si j’enfreins quelque loi,

Ma vérité est bien plus belle:

Je n’ai qu’un coeur, il est à toL

- Que penses-tu de mon poème, Maîtresse?

- Pas mal J il m’a émue, mais tu as oublié de te présenter et de le signer!

- Pas grave J Mes lecteurs ont déjà compris que je suis

le Chat

- Et dis-mo4 Maîtresse ... Puis-je devenir le Victor 1-fugo des chats?

- On peut toujours l’espérer! Même si cela me semble un peu présomptueux de ta part, continue d’écrire et qui sait?

Jacqueline Lenoble

La mort du chat

 

Ce n’est qu’au second jour d’une quête effrénée

Qu’elle l’a découvert au détour d’une allée

Tué, au pied d’une haie d’une balle en plein front.

Quel sinistre chasseur, par ce cruel affront,                                       

S’est plu à retrancher de sa vie solitaire

L’humble et unique ami qui lui restait sur terre ?

Son chat mort dans les bras, les yeux noyés de pleurs,

Vite, il lui faut rentrer, éperdue de douleur,

Effleurant les doux poils de l’ultime caresse

Dont il ne pourra plus mesurer la tendresse.

 

C’en était donc fini de ces moments si doux,

De tant de petits riens qui signifiaient beaucoup,

Des échos de sa voix qui se voulait grondeuse

Mais où vibrait toujours une note joyeuse

Lorsque Minet rentrait plus tard que de raison.

-Mais où donc étiez-vous, monsieur le vagabond ?

Elle ajoutait parfois, se moquant d’elle-même,

-Voyez l’heure qu’il est ! –Innocent stratagème ;

-Et si je vous laissais dehors, tel un vaurien ? -

Tout en sachant, bien sûr, qu’elle n’en ferait rien.

Elle aimait ses yeux clairs, toutes ses drôleries,

Son ronron perpétuel et ses câlineries

Quand le soir, près du feu, en la voyant rêver,

Au creux de ses genoux il venait se lover.

Alors, la détournant du tricot ou du livre,

Sur l’ouvrage il posait sa patte impérative.

Elle, sans se fâcher, portant sur lui les yeux,

Murmurait : - Mon Minet, on est bien tous les deux ! -

 

Le feu s’est consumé et la lampe est éteinte,

Et dans l’obscurité monte une morne plainte.

L’ombre s’est épaissie; la froide nuit d’hiver

A repris possession de tout son univers.

Et devant l’âtre éteint où ne luit nulle flamme,

Navrants sont les sanglots de cette pauvre femme

Qui, ayant étendu son chat sur ses genoux,

S’obstine à lui parler avec des mots très doux.

 

Jacqueline LENOBLE- février 2002